Nous savons tous que nous devons innover pour survivre. Certaines entreprises maîtrisent visiblement l’art de l’innovation : elles sont en mesure d’abattre des murs, de développer des produits, de changer d’objectif en un éclair et de révolutionner des secteurs entiers. Mais pour la plupart, l’innovation constitue un défi complexe que les processus, les gens et les réglementations viennent entraver.
En tant que leader mondial sur le marché, comment encouragez-vous votre équipe à innover de manière disruptive ?
On dit que la nécessité est mère de l’invention. J’ai grandi en Afrique du Sud où la pénurie a fait partie de mon quotidien. Nous devions exploiter au maximum ce que nous avions. Nous innovions naturellement sans jamais employer ce mot.
La plupart des entreprises mondiales ne connaissent pas la pénurie. Même si elles doivent faire face à des éléments disruptifs, elles continuent de disposer de ressources et d’un capital importants. Il n’est pas surprenant qu’elles soient incapables d’innover. En vérité, elles n’ont pas connu un besoin impérieux de procéder différemment. J’ai toutefois découvert qu’il existe diverses façons de créer un environnement qui induit la nécessité d’un changement et encourage la culture de l’innovation.
Basculer d’une vision négative vers une vision positive
Pénurie. Combativité. Échec. Ces mots peuvent avoir une connotation négative. Ils sont pourtant positifs en matière d’innovation.
Lorsque les gens entendent le mot pénurie, ils pensent à la privation des ressources indispensables à leur réussite. Pourtant, les startups savent qu’une situation de manque accroît la créativité du fait de l’enthousiasme et de la stimulation engendrés pour faire tourner l’activité et de la possible détermination insufflée au sein des équipes.
La combativité est une autre notion sous-évaluée ; vous pouvez être combatif sans tomber dans la médiocrité. L’innovation requiert de la rapidité (vitesse, agilité et réactivité), atout encouragé par la combativité. En étant « combatif », vous montrez que vous pouvez mener un travail à bien rapidement et en utilisant peu de ressources.
Chaque processus mis en place par une entreprise vise à prévenir un échec. Une fois que tous les systèmes sont sécurisés, il n’y a plus de place pour la créativité et l’innovation. Les dirigeants doivent revenir en arrière et créer des environnements sécurisés dans lesquels les employés peuvent tester une hypothèse, analyser les résultats et continuer d’expérimenter. L’innovation apparaît là où l’échec est considéré comme un catalyseur d’apprentissage.
Opter pour une gestion en mode investisseur en capital-risque
Tous les dirigeants doivent se comporter comme des investisseurs en capital-risque. Les investisseurs en capital-risque ont tendance à ne pas avoir peur de prendre des risques : ils savent qu’en investissant dans des startups, ces dernières continueront d’évoluer. Ils les laissent faire ce qu’elles ont à faire, car ils sont convaincus que les leçons qu’elles en tireront contribueront à leur réussite. Si tous les dirigeants d’entreprise adoptaient la même approche, ils offriraient à leurs équipes la liberté dont elles ont besoin pour innover.
J’ai adopté cette approche tout au long de ma carrière et je peux témoigner des bénéfices qu’elle est susceptible d’apporter. Par exemple, à l’époque où j’étais PDG d’Alaska Airlines, les prestations de vol constituaient l’un des principaux avantages des employés de la compagnie. Pourtant, le processus de réservation n’était pas optimal et, pour remédier à ce problème, j’ai donc monté une équipe d’employés motivés. Elle disposait d’un budget restreint et d’une totale liberté d’action, comme une startup. J’ai nommé un responsable et lui ai permis de se comporter comme le PDG de cette startup. L’équipe a très rapidement conçu des prototypes, créé des laboratoires d’expérience utilisateur, conclu des partenariats avec des entreprises locales et présenté des démonstrations lors d’événements organisés pour les équipes. Tout au long du processus, elle a relevé des défis politiques, budgétaires, techniques et d’effectifs. Finalement, son acharnement s’est traduit par la création d’une application mobile opérationnelle, appelée Hopper, qui possède sa propre interface Web et une équipe dédiée.
Mais surtout, le succès d’Hopper a créé une forte culture de l’innovation, offrant ainsi aux employés la possibilité de développer des solutions permettant d’améliorer leur propre expérience, ainsi que celle des clients.
Créer des espaces physiques, moteurs d’innovation
L’innovation n’est pas qu’un état d’esprit ou un processus. Les espaces physiques dans lesquels travaillent les équipes ont également leur rôle à jouer. Les gens ont tendance à adapter leur comportement à leur environnement. Par exemple, si j’emmène quelqu’un dans un lieu de culte, à un concert ou dans une bibliothèque, il est probable qu’il se comporte différemment dans chaque lieu. Chaque espace inspire un ensemble distinct de sentiments, émotions, processus de pensée et schémas comportementaux chez les personnes qui l’occupent.
Lorsque nous parlons d’innovation et de startups, la phrase qui revient le plus souvent est « trois mecs dans un garage ». Certaines des startups qui ont le mieux réussi au monde ont été créées dans un garage et ne s’en cachent pas : Amazon et Apple pour n’en citer que deux. Voici pourquoi : le garage est un environnement sûr. Il est informel, accueillant et privé. Il appartient au domicile. Il offre de la flexibilité : si votre bureau est dans le garage, vous pouvez définir vos propres horaires. Vous pouvez sortir, revenir et passer dans d’autres pièces. Vous êtes libre de travailler comme il vous convient le mieux. Cette liberté facilite la créativité sans crainte du jugement.
Lorsque l’on impose des limites à quelqu’un en matière d’espace et de temps, il ne peut pas laisser libre cours à sa créativité. Si Jeff Bezos et Steve Jobs avaient dû travailler dans un box gris et terne, je parie qu’ils n’auraient pas fait preuve d’autant d’innovation. Cela ne signifie pas que les équipes doivent véritablement travailler dans des garages, seulement qu’il faut supprimer les contraintes spatiales et temporelles tout en créant des environnements où les employés se sentent libres de penser et de créer sans retenue.
Créer des équipes diversifiées
La diversité est peut-être l’ingrédient le plus indispensable à l’innovation.
Nous sommes le résultat des expériences que nous avons vécues. Les angles suivant lesquels nous abordons un problème sont influencés par notre culture, genre, religion, orientation sexuelle, lieu de naissance, langue, éducation et formation.
Les mêmes types de personnes exploreront une seule voie. Nous devons en explorer plusieurs pour réussir.
In fine, l’innovation n’est rien moins que la résolution de problèmes. En offrant à vos équipes les conditions adéquates pour relever les défis, elles proposeront des solutions créatives auxquelles vous n’auriez jamais pensé.
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